L’exploit des Athletics

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Nouvelle page du Hall of Fame de Débats Sports. En 2002, les Oakland Athletics, franchise mineure de la ligue de baseball, rentrent dans l’histoire du sport. Retour sur leur exploit.



En 2002, la franchise de baseball d’Oakland sort d’une saison à 63% de victoires terminée par une défaite en séries de division de l’American League. Une performance de haut niveau pour une franchise relativement pauvre. Leurs bourreaux lors de cette série, les Yankees de New York  ont un budget bien supérieur à la franchise californienne. Et ce n’est donc pas un hasard si les Athletics n’arrivent pas à garder leurs meilleurs joueurs durant l’intersaison, ne pouvant s’aligner sur les offres mirobolantes des Red Sox et autres.

Afin de garder l’esprit de victoires dans la franchise, le general manager Billy Bean va révolutionner le recrutement. Le film « Moneyball » (Le Stratège) reflète cette saison délicate qui attendait les A’s. Pour ceux qui ont déjà vu le film, ou connaissent l’histoire de la franchise et du baseball en général, vous savez que la saison 2002 des Oakland Ahtletics est historique. La franchise va remporter 20 matchs d’affilée, battant ainsi le record de l’American League et échouant à une victoire du record général de la Major League Baseball, détenu par les Chicago Cubs avec 21 victoires.

Un exploit lorsque l’on sait le rythme infernal imposé aux joueurs. Certes ce ne sont pas sûrement les sportifs qui fournissent le plus d’efforts. Tous sauf un : le lanceur. Le titulaire change à chaque match, un joueur ne pouvant commencer qu’un match sur quatre ou sur cinq. Le pitcher est le seul joueur de l’équipe à fournir un effort intense tout au long du match. Il doit lancer plus d’une centaine de balle par match à plus de 130 km/heure, parfois plus. Une rotation est inévitable. Une franchise ne peut pas se permettre de payer quatre ou cinq pitchers de haut niveau, par conséquent le niveau de la franchise varie avec le lanceur titulaire. Les meilleures équipes ne peuvent donc pas se présenter avec leurs meilleures armes pour chaque match. C’est donc une extraordinaire performance de rester compétitifs durant 20 matchs de suite.

Refusant de chercher des joueurs présentant un profil similaire à ceux ayant quitté le navire, le general manager va adopter la technique de la sabermétrie. Ce terme barbare provient de l’acronyme SABR, pour Society for American Baseball Research. Cette “société” est fondée en 1971 et dès cette période l’étude des statistiques dans l’appréhension du jeu prend de l’importance. Mais c’est véritablement Billy Bean, en imposant cette vision du jeu à une franchise des ligues majeures, qui va bouleverser les méthodes de recrutement.

Alors que son équipe de scouts l’encourage à signer des joueurs dont le talent est confirmé et qui peuvent immédiatement être compétitifs pour l’équipe, le general manager va s’appuyer sur les statistiques pour recruter les joueurs. Peu importe que ces derniers soient blacklistés par la plupart des franchises, blessés depuis des semaines ou trop vieux, leurs chiffres parlent pour eux.

Leur début de saison est chaotique. Le 23 mai, ils présentent un bilan de 20 victoires pour 26 défaites. Mais dès le mois de juin, la méthode commence à produire des effets. Entre le 6 juin et le 24 juin, les Athletics remportent 16 matchs sur 17. Mais c’est le 13 août que la série historique va débuter. Par une victoire face aux Toronto Blue Jays, Oakland entame son étonnante série et fait tomber tous les records. Le 2 septembre face aux Kansas City Royals, les A’s égalent le record de 19 victoires consécutives détenu par les White Sox de 1906 et les Yankees de 1947. Le 4 septembre, une victoire à l’arrachée 12 à 11 permet aux Athletics de remporter leur vingtième victoire en autant de matchs.

La franchise établit un nouveau record dans l’American League mais a encore une victoire de retard sur les Cubs de 1935. Les Minnesota Twins se chargeront de stopper la série des A’s.

Ce seront ces mêmes Twins qui mettront les A’s en vacances lors des divisional series. Une troisième élimination consécutive à ce stade de la compétition et ce sera la même chose la saison suivante. A l’issue de l’élimination en 2002, Billy Bean sera approché par les Boston Red Sox, la franchise légendaire de la ligue. Il refusera une offre de 12.500.000 de dollars, qui aurait fait du  general manager le mieux payé de l’histoire du sport.

La défaite des Athletics donnera du grain à moudre aux détracteurs de cette méthode basée sur les chiffres, les pourcentages, les risques et les prévisions. Pour eux, seule la tactique de jeu peut permettre de gagner un match. Ils n’ont pas tout à fait tort. Billy Bean et ses analystes non plus.

Si la sabermétrie ne deviendra pas une norme dans toutes franchises des ligues majeures, certaines d’entres elles l’adopteront. Ce sera le cas des Mets, Yankees, Cardinals et bien sûr les Red Sox qui étaient prêts à s’adjuger le précurseur de cette méthode.

Ces mêmes Red Sox remporteront les World Series deux ans plus tard, et ainsi lèveront la malédiction de Babe Ruth qui datait de 1918. Aujourd’hui tout parieur ou fan de baseball épluche des données toujours aussi nombreuses afin de juger de la solidité d’un lanceur, du pourcentage de chance que le batteur frappe la balle…