La semaine passée, nous revenions sur le rôle de Jules Bianchi au sein de la Ferrari Driver Academy. Sa prolongation au sein de la structure jeunes pilotes de la Scuderia en font la figure de proue du programme. Luca Baldisseri, le responsable de la FDA fixe le cap. « Il est important pour notre projet que Jules atteigne son objectif. L’objectif est de lui offrir un bel avenir en tant que pilote Ferrari ». Il pourrait enfin en profiter pour accéder à un des derniers baquets disponibles, celui de coéquipier de Paul Di Resta chez Force India.
Depuis le départ de Niko Hülkenberg en direction de Sauber, le poste de second pilote de l’écurie indienne est le sésame le plus convoité. Depuis cette semaine, ils ne sont plus que deux en lice, principalement en raison des critères de sélections retenus par l’encadrement de l’écurie. A l’inverse du baquet disponible chez Caterham aux côtés de Charles Pic, l’argument financier n’est pas un critère déterminant si on en juge les déclarations du directeur des opérations de l’écurie, Otmar Szafnauer. Ainsi, les millions de contrat de sponsoring que peut apporter Bruno Senna ne permettront pas au neveu d’Ayrton de poursuivre sa carrière chez Force India. Ils restent toutefois un argument de poids pour le brésilien pour épauler Charles Pic chez Caterham. Sebastien Buemi n’aura pas non plus convaincu les dirigeants indiens et cherche désormais à prolonger son contrat de troisième pilote chez Red Bull Racing.
Un pilote talentueux pour une écurie ambitieuse.
Force India a programmé un investissement de 62 millions d’euros afin d’améliorer la compétitivité de l’écurie, le co-propriétaire, Vijay Mallya ayant de grandes ambitions. « Nous allons investir de manière importante dans les nouvelles technologies pour donner de nouveaux outils à notre équipe de design et ainsi tenter de grimper dans le classement ». C’est donc vers un pilote capable de faire progresser sportivement l’ensemble de la structure que se dirigera le choix de Force India.
Jules Bianchi ou Adrian Sutil ?
Jules Bianchi n’a plus qu’un seul rival pour le poste, l’ancien pilote maison, Adrian Sutil. Le pilote allemand a évolué au sein de l’écurie indienne pendant cinq saisons (4 sous l’appellation Force India et une alors que la structure répondait encore au nom de Spyker F1 en 2007). Chaque saison, il avait donné satisfaction en dominant avec une remarquable constance ses coéquipiers. En 2009, il avait marqué 5 points dans une auto encore parmi les plus mauvaises du plateau. Les deux années suivantes il terminera à 9 reprises dans les points, se classant 11ème du championnat du monde des pilotes en 2010 avec 47 points contre 21 à Vitantonio Liuzzi. En 2011, il réalise sa meilleure saison en Formule 1, terminant 9ème du championnat avec 42 points contre 27 à son coéquipier Paul Di Resta. Paradoxalement c’est à l’issue de cette saison qu’il quitte l’écurie, remplacé par Niko Hülkenberg. Il quitte également le monde de la Formule 1 avec une image entachée par une vilaine bagarre en boîte de nuit à l’issue du Grand Prix de Chine qui lui valu une condamnation par la justice à 200 000 euros d’amende et de 18 mois de prison avec sursis.
Le recrutement du pilote allemand de 29 ans serait en quelque sorte un retour en arrière pour l’écurie indienne. Son retour chez Force India ne serait pas sans soulever quelques problèmes d’image. Mais son expérience et sa qualité de metteur au point seraient des atouts considérables alors que la discipline s’apprête à accueillir une nouvelle réglementation en 2014, propice au bouleversement des rapports de force. Il peut remercier Kimi Raïkkönen auteur d’une splendide saison après deux ans passés en WRC. L’exemple d’Iceman indique que le pilote allemand peut se montrer compétitif dans l’élite du sport automobile malgré son éloignement forcé. Mais n’est pas Raïkkönen qui veut.
Une chose est certaine, le futur pilote Force India connaîtra bien la maison. Pilote essayeur cette année chez Force India, Jules Bianchi s’est idéalement positionné pour devenir le coéquipier de Paul Di Resta chez l’ambitieuse écurie indienne. Cette saison il a disputé 9 séances d’essais libres au cours desquelles il a tourné en moyenne une demie seconde moins vite que Niko Hulkenberg, se rapprochant constamment des temps de l’autre pilote Force India. Lors de la séance à Abu Dhabi il tourna à 2 dixièmes de l’allemand. Des signaux encourageants sur sa capacité à être compétitif au volant de la monoplace indienne.
Son outrageuse domination lors des essais pour jeunes pilotes, que ce soit avec une Force India ou une Ferrari, plaide également en sa faveur. Sur le talent pur, Jules Bianchi ne démériterait pas d’obtenir un baquet de pilote titulaire en Formule 1 malgré un palmarès encore vierge. Cette saison, il échoua à la seconde place des Renault World Series 3.5.
Si l’argument financier ne devrait pas aider la direction de l’écurie entre les deux prétendants, d’autres critères pourraient faciliter leur décision. A cet effet, les négociations entre la Scuderia Ferrari et l’écurie indienne pour que les Force India disposent dès 2014 de moteurs Ferrari et non plus Mercedes, semblent être le principal levier de Maranello pour placer Jules Bianchi dans un baquet.
Paradoxalement, les plans de la Scuderia de rapatrier Jules Bianchi chez les rouges au cas où son expérience chez Force India soit concluante jouent contre le pilote niçois. En effet, les plans de développement de Force India visent 2014 et l’introduction de la nouvelle réglementation pas la saison 2013 où l’écurie indienne n’apportera pas de changements radicaux. Au contraire, comme l’indique Paul Di Resta, Force India cherchera avant tout à surfer sur leur bonne fin de saison 2012, tout en travaillant sur l’auto de 2014. « D’une certaine façon, nous pouvons être heureux que les règlements changeront peu l’an prochain car la nouvelle voiture sera déjà plus compétitive, elle sera une évolution de celle utilisée cette année. Donc il n’y a pas de véritable changement dans la philosophie. Il s’agit de travailler sur les petits détails, ceux qui font la différence ».
Le challenge serait excitant pour Jules Bianchi. S’il venait à être éconduit, ses perspectives de s’installer un jour dans un baquet titulaire s’assombriraient considérablement et Luca Baldisseri pourrait bien ranger définitivement ses plans.