La saison 2012 de Formule 1 est passionnante. Le suspens est présent à chacun des Grands Prix et bien que Fernando Alonso ait consolidé son avance lors du Grand Prix de Monza, rien n’est joué pour les deux titres. Le pendant du suspens est toutefois l’absence de lisibilité sur les stratégies, les rapports de force entre écuries, bien aidée en cela par des pneumatiques Pirelli au comportement changeant d’un week-end à l’autre, d’un circuit à l’autre.
A sept courses du terme de la saison, nous avons décidé de revenir sur des considérations réglementaires qui ne manquent pas d’être mobilisées à des fins stratégiques. Nombreux sont les commentateurs et les stratèges à s’interroger sur la pertinence de se battre pour intégrer la Q3 quand on sait que les places suivantes permettent plus de liberté tactique. La rédaction de Débats Sports a donc mené l’enquête.
Les qualifications se déroulent en trois étapes. La Q3 ne présente guère d’intérêt si ce n’est de déterminer lequel des pilotes accompagnera les Marussia, HRT et Caterham dans la charrette. La Q2 est en revanche bien plus intéressante. En effet, il s’agit pour les top team de parvenir à qualifier ses monoplaces sans user les gommes et notamment les jeux de pneumatiques tendres qui se dégradent si rapidement. Pour les équipes de milieu de tableau, l’enjeu est d’autant plus intéressant que le résultat va conditionner les stratégies de course et donc les perspectives de marquer de gros points.
Les pilotes n’ayant pas réussi à se hisser dans le Top 10 au cours de la Q2 se trouvent éliminés et s’élancent depuis le rang auquel ils ont terminé la Q2. Or à la différence des 10 monoplaces de tête, les pilotes classés à partir de la 11ème position peuvent changer de gommes et opter pour des stratégies décalées plus appropriées à d’épiques remontées.
La 11ème place sur la grille est donc sur le plan théorique triplement avantageuse par rapport à la 10ème position. Elle permet d’adopter les pneumatiques les plus adéquats aux conditions de course. Elle est également la conséquence d’une élimination en Q2 et à ce titre permet l’économie d’un train de gommes. Elle permet par ailleurs de s’élancer du côté impair, soit le côté propre de la piste et de bénéficier d’une adhérence optimale au moment du départ, a contrario de la…10ème place.
Par extension nous avons appliqué l’analyse aux pilotes ayant terminés les qualifications entre les 7ème et 14ème positions afin de déterminer si un mauvais résultat en course était corrélé par une mauvaise qualification et inversement.
Méthodologie de l’enquête:
Nous avons extirpé des classements les seuls résultats des pilotes s’étant qualifiés à des positions comprises entre la 7ème et la 14ème place. On a reporté pour chaque GP, hormis celui de Malaisie qui s’est déroulé dans des conditions dantesques, les résultats obtenus le dimanche après midi, en calculant l’évolution de la position par rapport à la place obtenue en qualification.
Parmi les résultats qui nous intéressent ici, la confrontation directe entre les qualifiés 10ème et 11ème, en terme de confrontations directes, et de points marqués.
On a enfin dressé un classement propre aux qualifiés aux positions 7, 8, 9, 10, 11, 12, 13 et 14 en ne comptabilisant non pas les points aux pilotes mais à leur position de départ. Ainsi, on obtient un classement des positions sur la grille indépendamment de l’identité de ceux qui les occupaient. Deux classements sont dressés, un classement relatif sous forme de confrontation directe, et un classement absolu par points marqués au championnat du monde des pilotes.
Résultats
Les pilotes qui se sont qualifiés entre les 7 et 10ème positions ont globalement perdu des places lors de la course. De telle sorte que leur évaluation collective est de -14 contre une évolution de +13 pour les pilotes qui se sont élancés depuis les positions au delà de la 10ème place.
Il convient toutefois de préciser dès à présent la nécessité de nuancer ces données. Il est plus aisé de gagner des positions sur la piste le dimanche quand on a 13 monoplaces devant soi que quand on en a que six d’un niveau largement supérieur. En revanche, ce que ces données tendent à démonter c’est l’avantage tout relatif que procure les positions 7-8-9 et 10 sur la grille par rapports aux places suivantes.
Evaluation collective (7-10) = +5 / (11-14) = +17
Evaluation collective (7-10)= +7 / (11-14) = +14
Evaluation collective (7-10) = +1 / (11-14) = +3
Evaluation collective (7-10) = +7 / (11-14) = +1
Evaluation collective (7-10) = -9 / (11-14) = +7
Evaluation collective (7-10) = +2 / (11-14) = +20
Evaluation collective (7-10) = -10 / (11-14) = +1
Evaluation collective (7-10) = +1 / (11-14) = +4
Evaluation collective (7-10) = -6 / (11-14) = +6
Evaluation collective (7-10) = -1 / (11-14) = +28
Evaluation collective (7-10) = +8 / (11-14) = +6
Dès lors ces données confirment que les pilotes s’étant classés aux 11ème, 12ème, 13ème et 14ème positions sur la grille sont en mesure de mettre en place des stratégies agressives qui se traduisent par un nombre substantiel de places gagnées en course. A l’inverse, les pilotes s’étant classés aux 7ème, 8ème, 9ème et 10ème position adoptent des stratégies plus défensives en course. Rares sont ceux qui parviennent, en dehors des Lotus Renault, à améliorer leurs positions.
Dans la confrontation entre les pilotes s’étant élancés des 10ème et 11ème position, les résultats ne sont pas significatifs. Le 11ème sur la grille a devancé à 6 reprises le 10ème et inversement. Les pilotes s’étant élancés depuis la 10ème position ont marqué plus de points que ceux qui ont pris le départ depuis la position suivante. Les conclusions sont plus intéressantes et concordent davantage notre hypothèse lorsque l’on étend l’analyse aux places comprises entre la 7ème et la 14ème.
De l’ensemble des données recueillies nous établissons un classement des positions relatives et un classement absolu en terme de points remportés au championnat du monde des pilotes en fonction des places occupées sur la grille de départ.
Sur les douze premières manches de la saison, si on ne considère que les pilotes s’étant élancés depuis les positions comprises entre la 7ème et la 14ème place, s’élancer de la 11ème place n’est pas une mauvaise affaire. Au contraire dans ce mini-championnat à 8, la place de 11ème sur la grille est celle qui permet de devancer le plus souvent ses adversaires.
Autre donnée marquante. Les pilotes s’étant élancés depuis la 11ème place ont remporté 70 points au championnat du monde des pilotes, contre seulement 24 pour les pilotes s’étant élancés depuis la 8ème position. En excluant, les Lotus Renault, aussi redoutables en course que médiocres dans l’exercice du tour rapide, de ces classements les données sont encore plus limpides. La 11ème position devient celle qui permet de marquer le plus de points. Toutefois, les 13ème et 14ème place, complexifient la chasse aux points.
Si elle ne peut faire l’objet d’une stratégie a priori, la 11ème place doit être saisie comme un avantage tactique déterminant par ses occupants.