Après un mois d’Avril fort de huit tournois sur terre battue, Mai arrivait avec 5 autres tournois sur la surface ocre, avec, un point d’orgue, le second Grand Chelem de la saison. A Roland Garros, et plus généralement sur les quatre autres tournois, les joueurs de notre sélection ont brillé. Et, même si certains ont déçu, l’impression générale semble être de plus en plus positive, mois après mois. Désormais, c’est sur gazon que les 13 joueurs auront à coeur de briller.
Retour sur la fin de la saison sur terre battue, et sur les espoirs de chacun pour les deux mois à venir. Avec, en objectif surprême, le tournoi le plus mythique du monde, au All England Lawn Tennis and Croquet Club.
Nous avions laissé Kei Nishikori vainqueur à Barcelone, après un succès en finale contre Pablo Andujar, qui laissait présager le mieux pour le tryptique Madrid-Rome-Paris. L’impression laissée par le Japonais fut très acceptable, sans pour autant qu’il ait réalisé de grands exploits. Au vu des résultats, nous sommes, il est vrai, relativement sévères.
Demi-finaliste à Madrid après une victoire très sèche contre Ferrer, il s’est incliné contre le futur vainqueur, Andy Murray. Re-belotte à Rome, ou c’est cette fois-ci en quart de finale que le futur lauréat, Novak Djokovic, l’a défait. A Roland Garros, il a profité des quatre premiers tours très faciles, avec des victoires contre Mathieu, Bellucci, Becker par WO et Gabashvili, pour arriver très frais contre Tsonga. Invisible pendant 2 sets, le japonais semblait ratatiné par l’ambiance, le vent, et la puissance du français. Remis dans la partie, il a fini par s’incliner dans le 5ème set, après avoir été breaké d’entrée. Désormais, c’est vers le gazon qu’il faut se tourner. Cette surface est, sans aucun doute, celle qui sied le moins à Nishikori. Huitième de finaliste à Wimbledon l’an dernier, il peut viser mieux cette saison, mais le voir réaliser la même performance serait déjà une réussite, tant son jeu de contreur semble peu adapté au gazon, qui demeure, malgré tout, la surface la plus rapide du circuit ATP.
Il y a des choses qui ne s’expliquent pas. L’histoire de Grigor Dimitrov à Paris est de celles-là. Comme l’an passé, il avait réalisé une préparation très correcte sur terre battue. Quart de finaliste à Monte Carlo et demi-finaliste à Istanbul en Avril, il a fallu un bon Rafael Nadal pour le stopper en quart de finale à Madrid. Battu par un Fognini en feu dans un Foro Italico non moins incandescent, il arrivait à Paris avec bon nombre de certitudes, et avec l’envie d’effacer cette défaite en trois sets vécue l’an passé. Mais comme en 2014, c’est en trois sets, et d’entrée de tournoi, que le bulgare a quitté Paris. Et comme en 2014, c’est un cogneur qui a évincé Dimitrov. Certes, Jack Sock a réalisé un bon match (et un très bon tournoi), mais le niveau de jeu affiché par Grigor fut très faible, et c’est une litote.
Finalement, son match le plus abouti de cette saison sur terre, c’était en huitième de finale, à Madrid. Très solide, il avait réalisé l’un des meilleurs matchs de sa saison. En face, c’était Stan Wawrinka qui avait cédé, dans un match où lui aussi semblait retrouver ses sensations. Lorsque l’on pense à leurs deux trajectoires, ce match semble ne jamais avoir existé…
Sur gazon, en cas de bonne préparation, il pourrait arriver parmi les favoris à Wimbledon. Demi-finalise l’an passé, il avait pratiqué le meilleur tennis de sa carrière à Londres. Et certains amoureux des statistiques ont déjà tout prévu : En 2003, Roger Federer quittait Paris dès le 1er tour. 6 semaines après, il remportait Wimbledon. Le temps tourne pour Dimitrov. Les prochaines semaines pourraient être cruciales pour « Baby Fed ».
Comme nous le disions, certaines choses ne s’expliquent pas. Et, pour tout dire, bien fort est celui qui peut expliquer la carrière de Gaël Monfils. Rien ne semble cohérent, et il l’a encore montré ce mois-ci. Battu à Bucarest par Garcia-Lopez et à Madrid par Granollers, il n’avait pas vraiment rassuré avant Roland Garros. Mais ce tournoi transforme toujours le Parisien. Quatre sets contre Roger-Vasselin semblaient l’avoir lancé tranquillement dans le tournoi. Mais contre Schwartzman puis Cuevas, Gaël a fait du Monfils. Sans manquer de respect aux deux très talentueux sud-américains, le français semble tout de même avoir une marge sur ces deux hommes. Pourtant, il lui a fallu cinq sets à chaque fois, dans des matchs rocambolesques devant un public surchauffé. LaMonf a fait tout ce qui fait qu’il est à part dans le tennis mondial. Contre l’argentin, il a joué avec le feu, connaissant des trous noirs affolants avant de sortir des coups droits venus d’ailleurs, ou encore de claquer quatre aces de suite. Contre l’Uruguayen, il s’est retrouvé mené deux sets à un, 4-1 dans la 4ème manche. Il jouait dans les carrés, en marchant. Et, d’un coup (au propre comme au figuré), la machine s’est rallumée, et il s’en est sorti. Ses moments hors du temps, ses matchs finis à la tombée de la nuit font de Roland Garros ce qu’il est. Mais, sans cette énergie superflue dépensée, peut être qu’il aurait pu sortir Federer en huitième de finale. Mais celà, c’est une autre histoire. Quoi qu’il en soit, perdre en quatre manches contre le numéro deux mondial n’a rien de ridicule. Et les spectateurs présents lors de ses deux match marathons s’en souviendront à vie. Voilà ce que semble être Monfils aujourd’hui. Un showman, autant qu’un tennisman. Et vu la passion qu’à Monfils pour le gazon, on ne lui prédit pas une grande saison sur herbe…
Le tournant qu’est en train de prendre la saison d’Alexander Dolgopolov commence à devenir franchement inquiétant. Comme l’an dernier, il s’est incliné d’entrée à Roland Garros, contre le revenant Nicolas Almagro. Absent à Madrid, il avait chuté contre Garcia-Lopez à Rome, puis contre Gulbis à Paris. Peu de choses à dire, tant cette saison est le symbole de la carrière de l’Ukrainien. Et, malheureusement, elle semble enterrer définitivement les espoirs de voir Dolgo présenter une cohérence de jeu à la hauteur de son talent.
Sur herbe, le génial ukrainien est le même qu’ailleurs : imprévisible. L’an dernier, il avait poussé Dimitrov, futur demi-finaliste, dans un match marathon en cinq sets. Ce coté imprévisible, comme Monfils, rend ce joueur extrêmement intéressant à suivre. Car lui, plus que tout autre membre du top 100, peut jouer un match de folie avant de s’éteindre totalement au match suivant. Comme nous l’écrivions au dessus, ces joueurs font le sel du tennis. Mais, il est vrai que, par moment, l’on se demande ce qu’il leur manque pour être des membres à part entière du top 15, voire du top 10.
Même si les résultats bruts ne paraissent, au premier coup d’oeil, pas fantastiques, David Goffin a peut-être réalisé le meilleur mois depuis le début de saison, du moins en terme de niveau de jeu. A Madrid, après avoir sorti Gulbis, il a livré un match époustouflant contre Nishikori, s’inclinant en trois sets dans une partie qui a pris des allures de ping-pong tant le rythme et la brutalité des coups furent impressionnants. Quart de finaliste à Madrid, après avoir sorti notamment Tsonga, il a fallut trois sets à Ferrer pour se débarrasser du jeune belge.
A Roland Garros, le tournoi qui l’avait révélé en 2012, il a sorti Krajinovic puis le toujours dangereux Giraldo, avant de chuter contre Chardy qui a, selon ses dires, réalisé l’un des matchs les plus aboutis de sa carrière. Le natif de Rocourt va bientôt attaquer une deuxième partie de saison où il aura un nombre incroyable de points à défendre. Pour ce « mini nishikori », les remarques sont les mêmes que pour le nippon. Le voir briller à Wimbledon serait une surprise pour celui qui n’y a pas gagné un match depuis 2012.
Sur le circuit principal, le mois de mai de Jiri Vesely est dans la lignée des quatre premiers mois de l’année. Défaite d’entrée dans la capitale espagnole contre Cilic, puis au deuxième tour à Rome face à Nishikori après une victoire contre l’indigent Gulbis, il n’a pas fait mieux à Paris, sorti en cinq manches par la tête de série numéro 22, l’argentin Mayer.
Le tchèque est donc retourné sur le circuit secondaire, participant, et gagnant, le très relevé challenger de Prostejov, chez lui, en République Tchèque. Le costaud gaucher avait connu un 3ème tour l’an dernier à Wimbledon, après avoir notamment sorti Gael Monfils. Puissant et très bon serveur, le gazon semble bien aller à Vesely. Lui qui a su retourner sur le « petit » circuit pour retrouver des sensations, pourrait bien voir cette victoire à domicile lui redonner confiance pour la deuxième partie de saison.
Après Jiri Vesely en janvier, c’est au tour de Dominic Thiem de se « dépuceler » en remportant, à Nice, le premier tournoi ATP de sa carrière. Sur la Côte d’Azur, celui qui est désormais 30ème mondial a vécu une semaine superbe, s’offrant un plateau royal en sortant coup sur coup Estrella-Burgos, Kyrgios, Gulbis, Isner puis Mayer.
Finaliste à Kitzbuhel l’an dernier, il s’est donc offert son premier trophée pour sa deuxième finale. Un mois globalement satisfaisant dans l’ensemble puisqu’il avait, en Italie, atteint le 3ème tour, s’inclinant contre Wawrinka. Sur la terre battue Parisienne, il a livré un formidable combat au second tour contre Pablo Cuevas, s’inclinant en quatre manches contre un spécialiste de la surface ocre.
Début juin, il a donc atteint le meilleur classement de sa carrière. Sorti d’entrée sur les deux tournois sur gazon l’an passé, il n’aura donc aucun point à défendre. Son tennis foudroyant devrait lui permettre, au contraire, d’en grapiller durant les prochaines semaines.
Quatre tournois pour Nick Kyrgios ce mois-ci, soit presque autant que lors des quatre premiers mois (5 tournois). Sur ces tournois, un peu de tout pour le nouveau phénomène du tennis mondial. Le meilleur, pour commencer, avec une victoire colossale contre Federer à Madrid, dans un combat titanesque de trois tie-break remporté à la force du poignet et de la tête. Puis, un bilan mitigé avec des défaites contre Feliciano Lopez au Foro Italico, pourtant loin d’être un adepte de la terre battue. En France, c’est un abandon contre le futur vainqueur Thiem à Nice, puis un 3ème tour à Paris et une défaite séche contre Andy Murray. Match où il quand même réussi à inscrire le point du tournoi, d’un fantastique tweener pour lober l’écossais.
Place au vert désormais. L’an passé, Kyrgios avait explosé à la face du monde entier à Wimbledon, avec notamment une victoire contre Gasquet, mais surtout en sortant le numéro un mondial Rafael Nadal en huitième de finale. Depuis, le gamin a confirmé, et a montré que, sur les Grand Chelem, il savait élevé son niveau de jeu. On lui en demande surement beaucoup, mais, tête de série, il doit pouvoir une nouvelle fois rallier la deuxième semaine dans le temple du tennis. 25ème mondial, il est bon de rappeler que l’Australien vient tout juste d’avoir vingt ans. Une contre performance à Londres ne serait donc pas véritablement un coup d’arrêt pour lui.
Vous en avez désormais l’habitude, mais nous passons d’un « Mister K » à un autre. Et si Kyrgios est désormais dans le top 30 mondial, il ne doit pas faiblir car Thanasi Kokkinakis arrive lancé comme un boulet de canon. 299ème mondial il y a tout juste un an, il était encore 149ème le premier janvier dernier. Début Juin, le jeune homme d’à peine dix-neuf ans est classé au 69ème rang mondial. On ne le répétera jamais assez, mais ces deux-là ont tout ce qu’il faut pour être les chouchous du tennis mondial. Mais concentrons nous sur Kokkinakis. Après être sorti des qualifications à Madrid (avec une victoire contre le 528ème mondial au dernier tour, un certain…Janko Tipsarevic), il a lutté trois sets pour s’inclincer contre Querrey.
Sur le circuit secondaire, à Bordeaux, il est sorti des qualifications, puis a traversé tout le tournoi pour remporter le premier challenger de sa carrière contre De Bakker en finale. Invité par les organisateurs de Roland Garros, il s’est imposé d’entrée contre Basilashvili. Et puis, le chef d’oeuvre. Contre Tomic, il s’est retrouvé mené deux sets à zéro. Après une chute très impressionnante en fin de 4ème set, il a tout de même poussé son compatriote dans un 5ème set. Mené 5-2, il a sauvé trois balles de matchs pour s’imposer 3-6 3-6 6-3 6-4 8-6 en 3h22 de jeu.
Malgré sa défaite logique en trois sets relativement accrochés contre Djokovic, il a montré une nouvelle fois qu’il n’avait peur de rien, et qu’il faisait partie, mentalement, de la race des très très grands. Kokkinakis va désormais découvrir le gazon, lui qui n’y a jamais joué sur le grand circuit. Avec, comme toujours, rien à perdre et l’insouciance de l’adolescence.
Lui aussi ne cesse de gagner des places au classement ATP. Désormais, Borna Coric est aux portes du top 40, à la 41ème place mondiale. Sorti en qualifications à Rome, il a brillé en France avec une demi-finale à Nice, s’inclinant contre Mayer, et surtout un troisième tour à Roland Garros, après avoir sorti deux joueurs très costauds, Querrey mais surtout le vétéran Robredo dans un match marathon. Et sortir Robredo en cinq sets sur terre battue, à l’âge de 19 ans, est un révélateur d’un talent au dessus de la moyenne. Au troisième tour, c’est l’une des révélations du tournoi, Jack Sock, qui a privé le croate d’une deuxième semaine à Paris. Moins flamboyant que les australiens, Coric avance dans l’ombre avec un tennis plus sobre mais tout aussi (voire plus) efficace.
L’an dernier, sur trois tournois sur herbe il n’avait pas gagné un match de qualifications. Il devrait faire bien mieux cette saison même si son jeu ne semble pas être particulièrement fait pour le gazon. Mais celui qui a pour objectif d’être numéro 1 mondial devra s’adapter à toute les surfaces pour cela.
Encore un joueur qui a réussi à rentrer dans le top 100 avant la mi-saison. Monté jusqu’au 90ème rang mondial, Lucas Pouille est désormais redescendu à la 94ème place. Au tournoi de Villa Primrose à Bordeaux, il atteint le troisième tour, sorti par le futur finaliste, De Bakker. A Nice, après une victoire contre Smyczek, il a chuté contre Mayer, adversaire favori de notre sélection puisqu’il aura également battu ce mois-ci Coric, Vesely, et qu’il se sera incliné contre Thiem. A Roland Garros, il a survolé le premier set contre Simon. Puis, il a déçu en s’écroulant lors des trois suivants, contre son compatriote qui semblait presque « prenable ». Cogneur, le nouveau membre du top 100 a toutes les cartes en mains pour réaliser de jolies performances sur gazon.
Depuis Janvier, il est loin d’être celui qui fait le plus parler de lui. Présenté en début de saison comme le joyaux ultime de cette sélection, Alexander Zverev est tout simplement le plus jeune joueur du top 100. 84ème mondial cette semaine, il a profité du circuit challenger pour faire son entrée dans la cours des grands. Demi-finaliste à Aix en Provence, avec notamment des victoires contre Ghem ou Przysiezny, il est allé, du côté de Heilbronn, remporter le 2ème challenger de sa carrière, avec là aussi des victoires contre des joueurs costauds, Zeballos, Stuff ou encore Pella, en finale. Sorti en trois manches au deuxième tour des qualifications par Igor Sijsling à Paris, le tout jeune majeur continue sa progression. Le petit frère de Mischa découvrira le gazon, lui qui n’y a jamais joué un match en professionnel. L’inconnu donc. Et encore une fois, rien à perdre pour cette fougueuse génération.
Comme toujours, nous terminons avec Stefan Kozlov. Le benjamin de cette sélection a réalisé, sur le circuit future, un excellent mois de Mai. 439ème il y a un mois, il a progressé de 80 places pour se retrouver 359ème mondial, soit son meilleur classement en carrière. En trois tournois en Mai, il a gagné onze matchs, soit trois de plus que lors des quatres premier mois réunis. Une finale sur le 15ème future américain de l’année, puis une autre au Mexique, aunsi qu’une demi-finale. Une régularité qui va faire du bien dans la saison de Kozlov. Le top 300 s’offre désormais à lui. En fin de saison, il se pourrait même que le Macédonien d’origine soit encore plus haut.