Patience

debats sports image par defaut
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Les Cavaliers sortent d’une défaite de 23 points face aux Pistons (7-23) à domicile. Les Cavaliers ne jouent pas bien. Les Cavaliers ont l’air d’une équipe prenable aux yeux du reste de la ligue. Les Cavaliers ont un bilan de 18-12, bon pour une cinquième place à l’Est. Les Cavaliers ne répondent pas aux attentes.



Les attentes, mais celles de qui ? Des médias? Des fans ? Des publicités diffusées lors des matchs télévisés à l’échelle nationale ? On s’attendait à ce que cette équipe fasse parti des cadors de la ligue, mais on s’attendait également à ce qu’elle rencontre des difficultés en cours de route. C’était le cas face à New York, lors du premier match de la saison, comme c’était le cas à Utah une semaine après, ou contre Atlanta et puis, plus récemment, contre Detroit.

Ce ne sont pas des accidents, ni des excuses. Ce sont les signes d’une équipe fébrile, qui n’est pas encore prête à faire face aux situations les plus ardues. Pas encore. Après 30 matchs joués, on ne peut pas s’attendre à voir les Cavaliers réagir comme le Heat de 2013, à l’époque double champion en titre.

Cette comparaison injuste semble revenir fréquemment. Probablement à cause de la présence d’un certain numéro 23. A ce stade de la compétition, en 2010, le Heat avait un bilan de 21 victoires pour neuf défaites. Ils avaient également Dwyane Wade, Chris Bosh et toute une organisation qui n’était pas peu familière avec le succès. A Cleveland, le dernier titre national remporté par la ville remonte à exactement 50 ans. Les autres joueurs majeurs, Kyrie Irving et Kevin Love, n’ont jamais participé à une série de Playoffs au cours de leur carrière. L’environnement, l’atmosphère et l’attitude qui entourent cette équipe sont bien différentes de celles à Miami.

Puisque nous sommes lancés sur la comparaison des coachs, parlons de la situation de David Blatt, et le parallèle avec Erik Spoelstra. Tout juste arrivé d’Israël pour coacher une jeune équipe, tactiquement innocente, Blatt apprend qu’il bénéficiera à la place de la présence d’un quadruple MVP et double champion NBA au sein de son effectif. Jusqu’à présent, les critiques envers lui se font nombreuses. Notamment parce qu’on ne remarque aucun de signe de son attaque si réputée sur le terrain, et que la défense des Cavaliers est risible.

Certains vont jusqu’à dire que l’attaque des Cavs n’est dictée que par leur joueur star, et non leur coach. Voilà une remarque qui rappelle celle effectuée à l’encontre de Erik Spoelstra à Miami, durant les premières années du Big Three. Ce n’est qu’après deux années, et deux apparitions consécutives en finale NBA, que le coach a commencé à être reconnu comme grand facteur de la réussite du Heat.

La réalité, c’est qu’il fallait désigner un coupable pour expliquer la défaite durant la finale de 2011. Tandis que certains portaient le masque de « méchant », d’autres comme Spoelstra se faisaient accuser d’être ignorant, et de n’apporter aucun changement au jeu de son équipe. Ce sont des mots similaires que l’on retrouve du côté de Cleveland aujourd’hui. Pour beaucoup, Mark Jackson aurait été une meilleure signature pour les Cavaliers que David Blatt. La seule manière d’être certain de ce choix, c’est de donner les clés au coach, et de lui faire confiance.

Rappelons qu’il ne s’agit que de la première saison de David Blatt en NBA. Lui, n’a véritablement coaché que 30 matchs NBA dans sa carrière. Sa connaissance du jeu n’est pas à remettre en question. Sa connaissance des tendances au sein de la ligue, en revanche, peut poser problème. D’où l’intérêt d’avoir un coaching staff. Tyronn Lue, embauché cet été, remplit le rôle du préparateur. Il est là pour faciliter la transition de Blatt en NBA et l’aider à se familiariser avec ces petites personnalités de la ligue, qui pourraient poser problème au cours d’un match. C’est la définition de l’adaptation.

L’une des grosses critiques envers Blatt cette saison concerne ses rotations, et plus particulièrement le temps de jeu de ses stars. Irving joue 38 minutes par match, mais à 22 ans, c’est acceptable. Love joue 36 minutes, ce qui est raisonnable pour un joueur de son calibre. L’ailier titulaire, quant à lui, passe 37.5 minutes sur le terrain. A presque 30 ans, et plus de 34 000 minutes jouées, nombreuses sont les voix qui s’indignent. Cependant, et en reprenant les propres mots du joueurs concerné, en activant son « chill mode« , il n’y a pas de raison valable pour ne pas le laisser sur le terrain 48 minutes tous les soirs.

En effet, s’il s’économise et qu’il préfère marcher pour revenir en défense, il n’a pas besoin de sortir du match. Il possède encore assez d’énergie pour attaquer. Bien évidemment, on grossit le trait, mais cette attitude perçue comme arrogante n’est nullement bénéficiaire aux plus jeunes de l’effectif. Imaginez-vous un Dion Waiters en chill mode. Le rêve pour Internet, le cauchemar pour les coachs.

Maintenant, parlons du côté plus technique du jeu, sans pour autant « sur-analyser ».

Le jeu de Kevin Love correspond étrangement à une métaphore de la saison des Cavaliers jusqu’à présent. Lors du premier quart temps, il enchaîne les tirs. Au poste, à trois points, en transition, il est partout et son effort se fait sentir en défense. Après cela, il s’éloigne progressivement de son jeu, sa métamorphose en un autre Ryan Anderson se poursuit jusqu’à la fin du match. Volontaire ou pas, ce plan de jeu pose problème.

Tout d’abord, s’il est volontaire, c’est un plan de jeu bien stupide. Limiter l’un des meilleurs ailiers fort de la ligue au tir à trois points, c’est se priver d’une arme redoutable pendant trois quart temps. De plus, son manque d’implication en attaque se fait ressentir en défense, puisqu’il perd de sa motivation. C’est une situation similaire à celle de Waiters l’an dernier, qui perdait l’envie de défendre après chaque tir manqué.

Cette saison, Love touche le ballon en attaque environ 69.1 fois par match. Il tente 12.8 tirs, et ne va aux lancers francs que 5.2 fois par rencontre. L’an dernier, il touchait le ballon environ 87.6 fois par match, tentait 18.5 tirs et allait aux lancers francs 8.2 fois par rencontre. Il semble nécessaire de rappeler qu’il joue avec deux autres superstars, mais apparemment la pétition qui vise à le dégager de Cleveland ne prend pas cela en compte.

Il serait encourageant d’impliquer Love plus régulièrement après le premier quart temps. Il prend plus de 35% de ses tirs (4.6) au cours des douze premières minutes, avant de s’effacer du jeu (ou d’être effacé). En gardant plusieurs shooteurs sur le terrain, Love pourrait bénéficier de plus de ballons au poste. On a vu des cinq avec Shawn Marion au poste quatre et Mike Miller au poste trois fonctionner, ça pourrait être une bonne solution pendant que les cadres se reposent sur le banc.

C’est tout pour l’attaque. Le mouvement plus naturel du ballon viendra sûrement plus tard dans la saison. La défense, en revanche, va continuer de poser problème avec l’effectif actuel. Il s’agit de changement qui se produiront plus tard.

Aujourd’hui, il est évident que l’organisation tout entière apprend à chaque match. C’est une situation unique pour eux. Jamais à Cleveland, une telle équipe ne s’était formée. Jamais une telle chance de remporter un titre ne s’était présentée. C’est là que repose la difficulté. On ne transforme pas une Peugeot 205 en une DeLorean DMC après quelques mois.