Yannick Noah, le roi du timing

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Ce n’est plus une rumeur. Après plusieurs semaines de bruits de couloirs, ce qui était pressenti est devenu officiel : Yannick Noah est le nouveau capitaine de l’Équipe de France de Coupe Davis. Le vainqueur de Roland Garros 1983 prend donc la succession d’Arnaud Clément.



Ce dernier aura donc été remercié deux mois après l’élimination de la France en quart de finale. Plus que la décision, c’est la façon de faire qui a gêné dans cette histoire. Gilles Simon, au nom de toute l’équipe, a dénoncé cette situation, déclarant dans les colonnes de l’Equipe :

« Ce qui s’est passé est au mieux extrêmement maladroit, au pire vraiment irrespectueux ».

Il est clair que le sort d’Arnaud Clément était réglé pour la FFT, alors que « La Clé » n’était pas au courant de la décision. Simon, encore, a parlé d’un manque de respect envers le capitaine de l’équipe de France. Quoi qu’il en soit, l’ancien finaliste de l’Open d’Australie ne semblait plus faire l’unanimité chez les joueurs français.

Une fois ce départ entériné, il ne faisait aucun doute que Yannick Noah allait devenir le nouveau capitaine de l’Équipe de France. Vingt ans après l’avoir quittée, le revoilà avec un objectif clair : Utiliser la meilleure génération de l’ère Open pour remporter la Coupe Davis. Pour cela, il déclare vouloir un cadre strict, ne plus laisser les joueurs diriger, gérer les égos et ne pas hésiter à faire des choix forts. De par son discours, Noah renvoie tout de suite l’idée de sauveur. Il n’a d’ailleurs pas hésité à critiquer Arnaud Clément, notamment au lendemain de la défaite contre la Suisse. Il avait également déclaré accepter de revenir si les cinq joueurs adhéraient à son projet. Des propos qui avaient choqué le capitaine de l’époque.

Mais au final, qu’est ce qui va changer entre Clément et Noah? Sur la forme, peut être pas mal de choses, chaque capitaine a son staff, sa manière de travailler, et de communiquer. Sur le fond…les choses sont plus floues. La Coupe Davis, comme le tennis mondial, est régie par le Big Four. La compétition n’est clairement plus la même qu’il y a 20 ans. Désormais, avoir un membre du big four dans votre équipe est presque une garantie de titre. Et lorsque vous n’en avez pas, il y a deux choses à espérer : soit ne rencontrer ni la Serbie, ni l’Espagne, ni la Suisse, ni la Grande Bretagne, soit réussir à gagner le double plus les deux autres simples.

La France le sait mieux que personne. Cette année, elle a chuté face à Andy Murray et la Grande Bretagne. L’an dernier, elle a chuté contre la Suisse d’un Federer en « petite » forme, malheureusement épaulé par un Wawrinka de feu. En 2010, c’est Djokovic qui avait éteint la France en Finale. En 2011, c’est Rafael Nadal qui s’était dressé sur la route de la France. Sur les six dernières éditions, la France a donc chuté à quatre reprises contre un membre du big four, à chaque fois, vainqueur de l’épreuve (En attendant peut-être la Grande Bretagne cette saison). Sur ses huit simples contre le Big Four, la France n’en a remporté qu’un seul, la victoire de Gaël Monfils contre Roger Federer en finale à Lille. Cependant, pour Noah, il y avait mieux à faire contre la Suisse et la Grande Bretagne. Quoi ? Seul lui le sait. Comme toutes les autres nations, les Français n’ont que très peu de chances de battre, au meilleur des cinq manches, un joueur du big four.

Alors évidemment, nous n’oublierons pas 2013, et cette défaite contre l’Argentine, à l’extérieur. Sur terre, Carlos Berlocq avait joué un mauvais tour aux Bleus, battant Tsonga puis Simon dans ce qui constitue deux grosses contre performances. Cependant, Clément avait rectifié le tir lors des deux dernières campagnes. Alors, pourquoi le licencier après deux campagnes satisfaisantes ? Parce que Yannick Noah voulait revenir.

Le timing surprend. Car si la Grande Bretagne remporte cette finale, où elle fait office de grande favorite, les quatre membres du big four auront remporté la Coupe Davis. Ce qui veut dire qu’il y a peu de chances de les revoir venir se battre pour le titre l’an prochain, surtout lors d’une année olympique qui surchargera encore un peu plus le calendrier ATP. Alors, qui peut rivaliser avec la France si l’on excepte ces quatre nations ? A l’heure actuelle, on serait tenté de dire « personne ».

Au premier tour, l’équipe de France recevra le Canada. Le profil « type » des équipes de Coupe Davis que la France pourrait affronter l’an prochain. Un joueur dans le top 15 mondial, et un autre joueur gravitant autour du top 50. Rien d’insurmontable quand vous comptez dans vos rangs deux joueurs parmi les onze premiers du classement ATP, et six dans les 32 premières places.

Car évidemment, les 4 grandes nations sont présentes. Mais l’absence plus que probable de leurs leader du « big four », leurs ambitions sont revues à la baisse. Seule l’Espagne peut jouer les troubles fêtes sans Rafael Nadal. Mais pour les quatre hommes, la compétition n’est pas la même. A eux quatre, ils présentent, dans le Groupe Mondial, un bilan de 59 victoires pour 9 défaites. Lorsque l’un d’eux a joué les deux simples, son équipe s’est toujours imposée, à deux exceptions près. En 2009, la Serbie de Djokovic avait été battue par…l’Espagne de Rafael Nadal. Le seul exemple qui contredit cette domination du big four, c’est donc la finale 2013, avec la République Tchèque vainqueur de la Serbie du Djoker, bien que ce dernier ait remporté ses deux matchs en trois sets.

Donc quelle concurrence pour la bande à Noah ? Elle risque d’être très faible. Parmi les 16 équipes, deux retiennent particulièrement notre attention. D’abord l’Australie du quator Tomic-Kyrgios-Kokkinakis-Groth, qui, coachée par Lleyton Hewitt, pourrait être très dure à manoeuvrer. Mais surtout la Croatie du trio Cilic-Karlovic-Coric semble être l’adversaire numéro un, entre un Karlovic sur qui le temps n’a pas de prise, un Cilic toujours imprévible et un Coric qui devrait littéralement exploser en 2016. Malgré tout, la France sera favorite de toutes ses rencontres.

Etre favori n’apporte pas de garantie, surtout en Coupe Davis, mais la densité au très haut niveau du tennis français devrait suffire. Surtout que, contrairement à bon nombre de pays, elle peut s’adapter à toutes les surfaces. Le retour de Yannick Noah pourrait donc être directement couronné de succès. Évidemment, cette victoire porterait son sceau, mais en revenant maintenant, alors que la France fera face à une conccurence bien moindre, il prend aussi un énorme risque. Car il est attendu comme le Messie, et que n’importe quel autre résultat qu’un titre serait une déception incroyable.

Depuis quelques années, Yannick Noah a beaucoup parlé, critiquant le Tennis français, et plus généralement le tennis moderne. A lui désormais de montrer sur le terrain qu’il possède les solutions pour gagner la Coupe Davis. Après avoir tant parler, il va falloir agir. Même si, évidemment, on aurait aimé le voir affronter la Suisse du duo Federer-Wawrinka dans un an. Pour pouvoir mettre à exécution ses solutions pour « faire mieux ».