Jo-Wilfried Tsonga parviendra t-il à remporter un tournoi du Grand Chelem ?

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L’US Open 2012 s’est terminé précocement pour Jo-Wilfried Tsonga, éliminé dès le second tour face au modeste Martin Klizan (6-4, 1-6, 6-1, 6-3). Jamais depuis l’Open d’Australie 2007 il n’avait été éliminé avant le troisième tour d’un tournoi du Grand Chelem. Alors accident de parcours ou illustration des limites d’un joueur qui ne succèdera pas à Yannick Noah comme vainqueur d’un tournoi du Grand Chelem ?



5ème mondial du mois d’avril à la fin juillet 2012, Jo-Wilfried Tsonga a occupé le meilleur classement pour un joueur français depuis la quatrième place de Sébastien Grosjean en 2002. Il est également le dernier national à avoir disputé une finale d’un des 4 majeurs, à l’Open d’Australie en 2008. A ce titre, tous les espoirs d’une prochaine victoire d’un français dans un tournoi du Grand Chelem sont placés en lui. Et le manceau a donné de sérieux gages de crédibilité.

Dès 2008, alors 38ème mondial, il se hisse en finale de l’Open d’Australie où il échoue face à un Novak Djokovic qui n’était pas encore le monstre qu’il deviendra en 2011.

L’an dernier, il réussit un exploit qui restera dans les annales de l’histoire du jeu. Mené 2 sets à 0 en quarts de finale de Wimbledon face à Roger Federer, le français renverse la tendance et remporte la rencontre. C’est le premier joueur qui ,mené 2 sets à rien par le suisse, a remporté le match. Malgré ces faits de gloire, Tsonga n’a jamais remporté le moindre titre du Grand Chelem et ne compte qu’un Master 1000 dans son escarcelle. La faute à un top 4 peu enclin au partage ?

Le palmarès des tournois du Grand Chelem est édifiant. Depuis l’édition 2005 de Roland Garros, le trio Roger Federer, Rafael Nadal et Novak Djokovic, a remporté 29 des 30 majeurs disputés, abandonnant le seul titre de l’US Open 2009 à Juan Martin Del Potro.

Dès que le circuit d’arrête sur un Masters 1000, le trio peut compter sur Andy Murray pour leur permettre de monopoliser l’ensemble des titres. Depuis la victoire de Soderling à Paris Bercy en 2010, les quatre premiers mondiaux n’ont pas laissé le moindre titre à qui que ce soit d’autre. Depuis 2009 et l’instauration de la nouvelle sémantique Masters 1000 seuls Davydenko (Shangaï 2009), Ljubicic (Indian Wells 2010), Roddick (Miami 2010) et Soderling (Paris-Bercy 2010) ont obtenu un titre dans cette catégorie de tournoi.

Dès lors s’érige la thèse selon laquelle Jo-Tsonga Wilfried Tsonga ne tombe pas au bon moment. Il émerge sur le circuit alors que le tennis mondial est dominé par le meilleur jour de tous les temps, son principal rival et un serbe qui a livré une saison 2011 d’anthologie. Cette théorie s’applique toutefois au britannique avant de convenir à la description du parcours du français. Celui qui peut se morfondre de sa situation c’est Andy Murray. L’écossais se serait certainement construit un palmarès étourdissant s’il était né une décennie plus tôt. Il en est toujours à la recherche de son premier titre en Grand Chelem.

Face à ce top 4 qui truste les titres les plus prestigieux, Jo-Wilfried Tsonga est présenté comme un sérieux outsider. Solide au service, de grande envergure et déployant une rare puissance dans la diagonale, le français dispose du jeu pour battre n’importe qui.

Il est, d’ailleurs, le premier joueur à avoir battu chacun des quatre premiers mondiaux (nous refusons l’expressions communément mobilisée pour décrire le quatuor « des quatre fantastiques ». Les nommer ainsi implique de les placer sur un plan d’égalité qui n’existe pas. C’est surtout considérer Andy Murray toujours à la recherche de son premier titre du Grand Chelem comme l’égal des trois autres collectionneurs de titres) dans un tournoi du Grand Chelem.

Le français a ainsi disposé de Federer lors du quart de finale de Wimbledon l’an passé. Il s’était vengé de Djokovic lors d’un quart de finale à l’Open d’Australie 2010. En 2008, année où il se qualifie pour la finale de ce même Open d’Australie, le français était parvenu à éliminer deux membres de ce top 4 (Murray au premier tour et Nadal en demie finale. Performance qu’il convient de nuancer. Lorsque Tsonga élimine l’écossais au premier tour ce dernier n’était que le 11ème mondial).

Le bilan de Jo reste toutefois très déficitaire face à ce top 4.

Face aux meilleurs mondiaux, Jo-Wilfried Tsonga perd plus souvent qu’il ne gagne. Mais il présente un bilan tout à fait acceptable face à des joueurs qui dominent outrageusement le circuit et l’ensemble de leurs concurrents. Avec un taux de victoire de 30% sur les quatre premiers mondiaux, Jo-Wilfried Tsonga devra réaliser deux exploits consécutifs et/ou compter sur des conditions favorables pour espérer remporter un Grand Chelem.

Reste qu’il ne se crée pas fréquemment les conditions de ces exploits. A l’instar de son échec à l’US Open 2012, le français échoue trop souvent avant de rencontrer un des membres du top 4.

Retour sur les résultats de Tsonga en Grands Chelems

Depuis sa finale de l’Open d’Australie qui l’a révélé au grand public, Jo-Wilfried Tsonga a disputé 16 tournois du Grand Chelem sans jamais parvenir à égaler cette performance depuis.

A y regarder de plus près, si Jo n’a toujours pas remporté de Grand Chelem, c’est avant tout parce qu’il… perd trop. Et surtout face à des joueurs bien moins classés que lui. Sa défaite face à la terreur des challengers sur terre battue (Martin Kilzan en a remporté 5 cette saison) n’est malheureusement pas exceptionnelle dans sa carrière en Grand Chelem.

  

En 16 tournois du Grand Chelem, il ne s’est qualifié qu’à trois reprises pour une demie finale. Seulement à six reprises son parcours a été stoppé par un membre du top 4. La présence de ces ogres sur le circuit n’est donc pas suffisante à expliquer les échecs répétés de Tsonga face à des Nishikori ou des Klizan. Derrière les Federer, Nadal, Djokovic et Murray, Jo-Wilfried Tsonga est loin de dominer le circuit. En concédant de trop nombreuses défaites face des joueurs bien moins classés que lui, Tsonga se prive d’une récurrence de la victoire qui habite les quatre premiers mondiaux.

Retour sur les performances de Jo-Wilfried Tsonga lors des deux dernières saisons :

Dresser la liste des joueurs l’ayant battu sur les deux dernières saisons est chose cruelle pour le français. Bien loin d’être privé de titre par le seul 4 majeur du circuit ATP, Jo-Wilfried Tsonga subit de trop nombreuses défaites face à des joueurs largement à sa portée.

En 2011, les joueurs suivants ont battu Tsonga : R. Federer (Doha, Rome, US Open, Paris Bercy, Masters Londres), A. Dolgopolov (Open d’Australie), R. Soderling (Rotterdam, Madrid), M. Youzhny (Marseille), X. Malisse (Indian Wells), I. Ljubicic (Monte Carlo, Metz), P. Cuevas (Estoril), S. Wawrinka (Roland Garros), A. Murray (Queen’s), R. Stepanek (Eastbourne), N. Djokovic (Wimbledon, Toronto), A. Bogomolov (Cincinnati), T. Berdych (Beijing), K. Nishikori (Shangaï), J-M Del Potro (Vienne), S. Querrey (Valence).

L’année suivante la liste n’est pas moins conséquente pour une saison qui n’est pas encore terminée : G. Monfils (Doha), K. Nishikori (Open d’Australie), J-M Del Potro (Dubaï), D. Nalbandian (Indian Wells), R. Nadal (Miami), T. Haas (Munich), A . Dolgopolov (Madrid), I. Dodig (Queen’s), A. Murray (Wimbledon), N. Djokovic (Londres JO, Roland Garros, Rome), J. Chardy (Toronto), J. Isner (Wiston Salem), M. Klizan (US Open).

Si l’actuel n°6 mondial n’a toujours pas remporté le moindre titre de Grand Chelem il le doit autant à la présence d’une génération exceptionnelle sur le circuit qu’à ses propres faiblesses. En jeu de retour tout d’abord. Bien qu’il se soit considérablement amélioré dans ce département du jeu, Tsonga demeure trop fragile en retour de service. Cette saison il ne remporte que 23% des jeux de retour qu’il dispute loin des pourcentages de Murray (31%), Djokovic (33%) ou Nadal (38%).  De cette faiblesse en jeu de retour résulte l’excessive dépendance du jeu de Tsonga de l’efficience de sa première balle. Toutefois quand celle-ci est performante, le français devient un joueur particulièrement dangereux. Disposant d’une grande envergure qui lui permet d’être solide à la volée et d’une puissance exceptionnelle en coup droit, il aurait tout intérêt à se tourner encore plus vers l’avant à la manière d’un Roger Federer.

Une telle évolution de son jeu, lui permettrait outre d’être plus dangereux encore, de compenser sa mobilité défaillante et d’économiser un corps fragile qui l’a longtemps privé d’une saison complète.

Dès lors son entêtement à ne pas vouloir travailler avec un coach, alors même que Roger Federer face à la domination temporaire de Rafael Nadal et l’émergence de Novak Djokovic a décidé de confier l’évolution de son jeu à Paul Anacone, l’ancien entraîneur de Pete Sampras, joue contre lui.

Une collaboration avec un coach devrait également lui permettre de pallier ses déficiences en matière d’appréhension mentale des grands évènements.

Pour espérer remporter un tournoi du Grand Chelem, Jo-Wilfried Tsonga devra remporter deux matchs consécutifs face à des membres du top 4. Le français a démontré qu’il était capable d’élever son niveau de jeu de manière ponctuelle. Toutefois, sur la durée d’un Grand Chelem, il doit rester concentré et s’économiser dans les matchs de la première semaine. Le problème c’est qu’une fois sur deux, il s’y fait éliminer.