Sam Hinkie a pris rendez-vous

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En l’espace d’un trade au soir du 27 juin dernier, les Philadelphia Sixers se sont positionnés comme des acteurs majeurs de la draft 2014. En échangeant leur meneur de jeu sélectionné pour le dernier All-Star Game Jrue Holiday et le choix 42 contre Nerlens Noel et le premier choix de draft protégé top 5 des Pelicans, Sam Hinkie s’est donné les cartes pour booster la compétitivité de la franchise au mois de juin prochain.



La draft 2014 sera le point nodal de la stratégie du nouveau GM de l’organisation, qu’il s’agisse de récupérer la star en devenir autour de laquelle construire les ambitions nouvelles de l’équipe, de se séparer de joueurs actuellement sous contrat ou de poursuivre sa collection de jeunes prospects et d’assets.

Le cœur du processus entrepris par Sam Hinkie réside dans la conviction que le groupe de joueurs dont il a hérité de la direction précédente n’avait, en l’état, aucun destin. Trop talentueux pour occuper les bas-fonds de la Ligue, pas assez pour aller chercher un titre, le roster laissé par Doug Collins était voué à installer encore davantage les 76ers dans la médiocrité.

Le trade pour Andrew Bynum ayant privé la franchise de nombreux assets, et la Pennsylvanie n’étant pas la destination privilégiée des Free Agents de renom, les perspectives d’une sortie par le haut de la médiocrité étaient proscrites. Restait donc celle d’aller chercher les renforts nécessaires via la prochaine classe de draft annoncée comme la plus riche en potentielles stars depuis une décennie.

Pour autant, la focale du projet des 76ers autour de la cérémonie du mois de juin prochain ne se circonscrit pas aux top picks dont la franchise disposera en raison de son propre bilan comptable et de celui des Pelicans qui malgré des départs balbutiants ne termineront pas dans les 5 derniers de la Ligue (la perspective d’un coup du sort de la loterie n’est toutefois pas à écarter définitivement).

Trouver la super-star indispensable à la quête d’un titre.

Suite à l’échange de Jrue Holiday, les 76ers ont récupéré deux jeunes prospects lors de la dernière draft qui pourraient devenir des éléments de base du projet à moyen terme de  la franchise : le second joueur à remporter le titre de joueur de la semaine pour ses débuts dans la Grande Ligue, Michael Carter-Williams et le prospect attendu comme le premier choix de la draft 2013 avant sa blessure, Nerlens Noel.

Si le processus entrepris par Sam Hinkie peut rappeler celui initié par Sam Presti à OKC, l’expérience de l’utilisation des assets accumulés par les Houston Rockets comme des monnaies d’échanges pour attirer une « star » déjà établie dans la Ligue proscrit tout déterminisme. Le raisonnement de Sam Hinkie est avant tout fondé sur la valeur. S’il perçoit la possibilité d’attirer plus de valeur dans son roster quitte à « sacrifier » des prospects perçus comme des éléments de base de la reconstruction, il n’hésitera pas à le faire. A ce titre, rien ne vient garantir que MCW et Nerlens Noel seront encore là pour le prochain season opener. Rien n’assure que les picks accumulés seront utilisés pour drafter des joueurs et non pour monter un trade.

Néanmoins c’est dans cette perspective que nous inscrivons la réflexion suivante. Les agissements à venir de Sam Hinkie ne sont pas prévisibles. S’ils l’étaient par de modestes observateurs de la franchise, ils le seraient par les autres GM, ce qui affaiblirait sensiblement la marge de manœuvre du front office.

Hasard ou non, les deux rookies draftés le 27 juin dernier évoluent aux postes 1 et 5 laissant le champ libre au recrutement d’une des 4 principales têtes d’affiche de la nouvelle classe de freshmen : Andrew Wiggins, Julius Randle, Jabari Parker, Dante Exum (s’il se présente à la draft) ou Aaron Gordon pour peu que les 76ers soient aussi mauvais qu’annoncé.

JuliusRandle

Si le pire bilan de la saison régulière ne garantit nullement le premier pick, il a le mérite d’assurer la possibilité de drafter un de ces quatre (cinq avec Exum) prospects.

Le pick de la Nouvelle Orléans pourrait alors venir combler le poste 2 avec un coéquipier d’Andrew Wiggins à Kansas, Wayne Selden. Les 76ers ressembleraient alors à ceci d’ici 8 mois : Michael Carter-Williams, Wayne Selden, Andrew Wiggins, Thaddeus Young, Nerlens Noel.  Ou tout autre type de combinaisons.

Au vu de la réputation de la prochaine classe de draft, les 76ers ne seront pas les seuls candidats à une reconstruction par le fond. Les Suns et le Jazz disposent également d’une solide collection de tours de draft, les Celtics pourraient bien se laisser tenter par le sacrifice d’une saison qui ne les conduira pas en post-season. La prospective sur la position des 76ers lors de la prochaine draft est complexifiée par la stratégie concomitante des autres GM. Mais les résultats probants obtenus par les hommes de Brett Brown ne doivent pas altérer la perception du niveau réel du roster, ni minimiser les probabilités de voir les 76ers échoir au dernier rang de la Conférence Est.

Si la première semaine de compétition a livré un enseignement, c’est bien que les espoirs de succès des 76ers sont conditionnés à des prestations individuelles remarquables simultanées de leur quatuor : MCW, Evan Turner, Thaddeus Young et Spencer Hawes.

Si elles venaient à se reproduire au delà de cette première semaine de compétition, et que les 76ers étaient atteints du syndrome Dre Miller, les perspectives de trades se densifieraient.

Des « leaders » sur la sellette ?  

La collection de picks de Sam Hinkie pourrait croître au cours de la saison. En effet, le rôle de la draft 2014 dans le processus de reconstruction des Philadelphia Sixers sera d’autant plus nodal que Spencer Hawes, Evan Turner, Thaddeus Young voire Lavoy Allen sont susceptibles de quitter la Pennsylvanie contre des picks, des contrats expirants et/ou des jeunes prospects.

Pour les trois joueurs, trois scenarii restent ouverts. Chacun ayant une influence sur le rôle des 76ers lors de la première cérémonie présidée par Adam Silver : convaincre le front office et le coaching staff qu’ils ont leur place dans l’effectif d’un contender, être échangés avant la deadline ou être utilisés pour trade-up dans la draft, voire quitter le navire lors de la free agency.

Spencer Hawes arrive en fin de contrat et nul doute que les Sixers ne lui proposeront pas une prolongation de contrat au tarif concédé par Doug Collins. Son contrat expirant et son profil de pivot fuyant pourraient intéresser une équipe candidate au titre qui souhaiterait ajouter une option tactique à son game plan. Pour autant, sa faculté à offrir du spacing plaide pour le maintien du républicain dans les systèmes de Brett Brown.

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La situation d’Evan Turner est légèrement différente dispose d’une qualifying offer à 8,7 millions de dollars à l’issue du présent exercice et sera restricted free agent. Quant à Thaddeus Young, il représente la plus valeureuse monnaie d’échange à disposition de Sam Hinkie.

Pour chacun des trois prospects, leur avenir immédiat dans le roster est autant si ce n’est plus déterminé par leur valeur sur le marché que par leur capacité à s’inscrire à moyen et long terme dans le projet des 76ers. Néanmoins, les offres de nature à convaincre Sam Hinkie d’inviter ces joueurs à préparer leurs valises ne devraient pas être légion et ce en raison d’a minima trois facteurs.

  • La situation contractuelle d’Evan Turner et Spencer Hawes renchérit paradoxalement la valeur de la présence de ces joueurs en Pennsylvanie. Les deux jeunes hommes disposant de contrats expirants, les contreparties proposées par les autres GM devront être non seulement considérées comme d’égale valeur au joueur souhaité mais aussi comme plus valeureuses que la marge de manœuvre financière potentiellement libérée en fin de saison. La mise en place d’un trade pour des picks ou des jeunes assets aura nécessairement pour « contrepartie » la présence d’un contrat lourd, ne serait-ce que pour rendre le deal conforme aux dispositions du CBA. Pour peu que ce contrat ne soit pas expirant, il viendra restreindre la flexibilité salariale des 76ers. Les prospects et assets proposés devront alors être considérés par Sam Hinkie comme plus intéressants dans le processus de reconstruction que le cap space sacrifié pour assurer leur venue (le contrat « pourri » accepté pour équilibrer l’échange). Concrètement, s’il venait à l’idée de Sam Presti d’acquérir Hawes en échange du contrat « pourri » de Perkins et de Jeremy Lamb. Sam Hinkie étudiera la valeur de Jeremy Lamb eu égard à la valeur de Hawes (et son contrat expirant) mais aussi au poids du contrat de Perkins, et à la  marge de manœuvre salariale ainsi sacrifiée.
  • Fortement valorisés, les picks du premier tour de draft 2014 sont excessivement « chers » sur le marché. Pire, ils sont devenus particulièrement rares. Réduisant drastiquement les options de trade. S’il s’avère incapable d’accroître son emprise sur le premier tour de draft, Sam Hinkie considèrera certainement la flexibilité financière comme plus utile que de nouveaux seconds tours. Se tourner vers des picks 2015 serait une initiative particulièrement avisée que ne manquera pas d’étudier Sam Hinkie mais nous sortons alors du cadre de la #WigginsRace.
  • Les partenaires potentiels de trade tendent à se limiter aux candidats au titre, voire aux équipes souhaitant renforcer leurs chances de réaliser un run pour obtenir un spot en post-season, réduisant ainsi les cibles atteignables parmi les assets visés.

Grandement apprécié par le staff et le front office, Thaddeus Young est paradoxalement la pièce dont un mouvement est le plus aisément identifiable tant sont nombreuses les franchises qui sortiraient renforcées de son arrivée. Il est aussi celui dont le profil correspond le plus à l’idéal type des joueurs qu’affectionnent Sam Hinkie. Le joueur ne devrait être « sacrifié » que venait à s’ouvrir la perspective d’accueillir au PCOM une pièce majeure. Or cette opportunité se présentera plus certainement au soir de la draft qu’à la veille de la deadline. En ce qui concerne Evan Turner, sur qui la franchise conservera la main (le second choix de la draft 2010 sera free agent restricted) et Spencer Hawes, tout sera affaire de conjecture. Les deux joueurs peuvent encore convaincre qu’ils ont leur place dans le projet des 76ers à terme et/ou accroître leur valeur sur le marché. Pour autant, un éventuel départ dans le cadre d’un échange devra rapporter davantage à la franchise que ce qu’elle peut escompter obtenir via le maintien de sa flexibilité financière.

A l’inverse, Sam Hinkie peut également, à la manière du trade entre les Warriors et le Jazz, utiliser sa flexibilité sous le salary cap pour attirer de nouveaux picks. Qu’ils soient du premier ou du second tour.

De l’utilité des seconds tours de draft

Au cours de la dernière draft, Sam Hinkie a transformé le 35ème choix des Sixers en Arsalan Kazemi, drafté au 54ème rang et en deux choix du second tour pour la draft 2014. En sus du leur, qui ressemblera à s’y méprendre à un choix du premier tour, les Sixers disposeront donc des choix du second tour des Rockets et des Nets. Or le rôle et l’utilité de ces seconds tours n’est pas à négliger.

Lorsque Sam Hinkie exerçait ses fonctions dans le Texas, les Rockets se sont distingués en magnifiant leurs seconds choix. Sans préjuger des talents et de la réussite des Sam Hinkie, ces derniers pourront être utilisés afin de ramener à Philadelphie, des roles players.

Si les 76ers terminent avec le dernier bilan de la Ligue, leur pick de second tour devait ressembler à s’y méprendre à un pick du premier tour avec l’avantage notable de ne pas être corrélé à un contrat garanti, renforçant ainsi la faculté de Sam Hinkie de trade-up si le besoin venait à s’en faire ressentir.

L’acquisition d’une franchise de NBA D-League renforce également la pertinence de cette collection de choix du second tour.

Du rôle de la NBA D-League et des Delaware 87ers.

Lors de la draft de NBA D-League qui s’est tenue le 1er novembre dernier, les Delaware 87ers, la franchise affiliée aux 76ers, s’est distinguée autant que faire se peut dans un tel évènement. Suite à un trade de dernière minute, les 87ers ont été en mesure de récupérer un second choix du premier tour (le pick n°6) en sus de celui qui leur revenait (9ème pick).

Ces deux picks ont été utilisés par Brandon Williams pour sélectionner deux prospects intrigants qui, à l’instar d’Aquille Carr récupéré au quatrième tour, ne sont pas susceptibles d’être appelés chez les 76ers cette saison, Norvel Pelle et Athanasios Antetokounmpo. L’intérêt est alors de créer les conditions optimales afin d’évaluer le potentiel, l’éthique de travail et la personnalité des prospects. Il sera alors temps pour les Philadelphia 76ers d’utiliser leurs choix du second pour drafter celui ou ceux qui auront convaincu…ou se les faire chiper sous le nez pas d’autres franchises.

Norvel Pelle

A l’issue du présent exercice, seuls Michael Carter-Williams, Jason Richardson (s’il décide de lever sa player option), Tony Wroten, Thaddeus Young, Arnett Moultrie et Nerlens Noel seront contractuellement engagés avec les 76ers. L’intersaison 2014 devrait voir un large turnover dans l’effectif. Si la marge de manœuvre financière dégagée par le trade de Jrue Holiday et la fin des contrats d’Andrew Bynum, Nick Young et autre Dorell Wright offrent de précieux atouts à Sam Hinkie, la première draft présidée par Adam Silver devrait marquer l’acte fondateur des ambitions nouvelles de la franchise.

Depuis sa prise de fonction, Sam Hinkie s’attache à s’octroyer les moyens de contrôler le processus de reconstruction de la franchise. Sa méthode : obtenir la flexibilité suffisante pour se positionner sur les prospects identifiés. Dans ce contexte, la draft présente l’incommensurable avantage de maximiser la liberté d’action du GM là où les trades la circonscrivent à ce que peuvent proposer les éventuels partenaires.

Une saison reste à jouer, et pour l’heure les Sixers dépassent les attentes, mais Sam Hinkie a déjà pris rendez-vous avec Adam Silver.