Lockout : Est-ce vraiment nécessaire ?

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La rédaction de Débats Sports a le plaisir d’accueillir aujourd’hui dans ses colonnes, la contribution d’un de nos plus fidèles « commentateurs ». Philodox revient sur le concept, l’histoire et les conséquences d’un phénomène bien connu des fans de sports US, le lockout. 



Lockout : Est-ce vraiment nécessaire ?  

Ces dernières années et même derniers jours, un mot est souvent revenu dans le monde du sport US, c’est le mot « lockout ». Mais qu’est-ce qu’un lockout ? Ce terme signifie littéralement « fermeture » dans la langue de Shakespeare et même s’il s’applique plus généralement dans le monde du sport, on le retrouve aussi dans le monde du travail en général.

Ce terme désigne une grève patronale où les dirigeants décident de fermer l’entreprise car une partie de ses salariés se mettent en grève en raison de désaccords de fonds. Ainsi les non-grévistes et l’environnement  (partenaires, sous-traitants…) sont pris en otage. C’est une pratique interdite en France et dans la plupart des pays européens car c’est une décision considérée comme immorale. Dans le cas sportif, on le retrouve essentiellement en amont du renouvellement ou de la signature des conventions collectives.

Pourquoi voit-on autant de Lockouts?

Le principal problème est évidemment financier, que ce soit en NFL, NHL, NBA ou autres ligues mineures, les différentes parties ont du mal à se mettre d’accord sur l’énorme gâteau des revenus de chaque sport sans oublier les bonus qui iront autour.

Prenons exemple sur le lockout NBA de la saison dernière où une nouvelle convention collective doit être réalisée. Les propriétaires des franchises voulaient avoir une part plus importante des revenus que les joueurs car la crise touche leurs clubs et ils perdent de l’argent. Les joueurs s’y refusent. Il aura fallu des mois et des mois pour trouver une solution qui n’a pas été totalement révélée au public. On a vu qu’un seul précédent (saison 98-99).

On est dans le même cas actuellement en NHL. Et la situation semble plus préoccupante encore puisque c’est le 4e lockout en NHL et le 3e sous le règne de l’ère Bettman. Pire encore, la saison 2004-2005 a été complètement supprimée, fait rare dans l’histoire des sports US. Aujourd’hui la plupart des observateurs semblent résignés et s’attendent au pire. Le problème est le même qu’en NBA. Avec une question financière comme principal élément de discorde. Actuellement les joueurs ont 57% des revenus et ne veulent pas descendre en dessous de 53% alors que les propriétaires veulent entre 50 et 56%. Le conflit porte aussi sur des considérations contractuelles. Les propriétaires ne veulent plus des  contrats à long terme (au cas où un joueur se blesserait ou ayant un problème interne, ile le paierai pour rien) sans parler des problèmes sociaux  comme les assurances, les droits publicitaires etc…

Prenons le dernier exemple en date avec la grève des arbitres titulaires face à la puissante NFL.Les arbitres veulent 2 choses : une meilleure répartition des gains + la conservation de leurs droits actuels pour leur régime de retraite.  Ce que refuse la NFL car en temps de crise, ils ne veulent pas augmenter les salaires pour des arbitres qui bossent à temps partiel (seulement les jours de match)

Evidemment le souci est moins important qu’un conflit propriétaires/joueurs mais le principe reste le même car ils ont les mêmes types de revendications. La différence viendra simplement de l’impact médiatique. La ligue représente les propriétaires des franchises donc forcément, c’est un conflit entre propriétaires et arbitres. Si demain les joueurs se mettent en grève, les arbitres seraient aussi victimes car ils se retrouveraient sans emploi. Les joueurs sont les acteurs principaux donc forcément plus exposés médiatiquement.

Il aura fallu une très forte pression populaire pour que les 2 camps finissent par s’entendre…

Avec cet aspect financier de plus en plus considérable dans ces sports majeurs, chacun des acteurs va  essayer de capter une part plus importante des revenus et ceci va tendre vers une généralisation des conflits et ce type de problèmes va s’étendre à l’ensemble des catégories sportives.

D’un point de vue extérieur, il n’est pas aisé de prendre parti pour l’un ou pour l’autre des camps. Chacun d’eux  aura ses raisons et elles semblent légitimes ou non mais le problème va au-delà d’une guerre entre 2 camps et cela les principaux intéressés semblent souvent l’avoir oublié…

L’impact de ces conflits sur le jeu et l’environnement sportif

Regardons ce qui s’est passé en NFL dernièrement, le lockout des arbitres a forcé la ligue à mettre des arbitres remplaçants venant des ligues universitaires et donc avec peu d’expérience.

Cette décision a été fatale : mauvais matchs de ces arbitres, beaucoup d’erreurs de jugements, pressions énormes autour d’eux. La goutte d’eau étant la fameuse polémique sur la dernière action du match Seattle-Green Bay.

Mais le problème majeur reste bien la suppression des matchs. Supprimer un match c’est une perte économique énorme que ce soit le revenu des matchs, des médias, des partenariats et ceci jusqu’aux retombées sur les sous-traitants et tous ceux qui bossent autour des matchs.

Est-ce que c’est vraiment acceptable ? Franchement ! Certainement pas.

Quand on connaît l’argent qui tourne autour de ces sports, on peut se poser la question de la pertinence de ces lockouts.  Une entreprise aussi lucrative que la NBA ou la NHL est prête à perdre des mois de compétition où l’argent pourrait tomber pour négocier des pourcentages vraiment faibles.

Maintenant, est-ce inéluctable ? Le meilleur exemple reste la MLB. Cette ligue a connu une période terrible avec 8 périodes de grèves  des joueurs et de lockouts de 1972 à 1995. Pour autant depuis cette période, ils ont réussi à trouver des solutions concrètes pour empêcher le lockout. Ils ont notamment fait une répartition plus équilibrée des revenus. Une des mesures principales c’est quand même le fait qu’il n’y ait pas de « salary cap » en MLB et donc les contrats des joueurs se négocient sans limites. A la place, ils paient une « luxury tax » (donc plus ils paieront un joueur cher, plus ils paieront de taxe. Ils ont aussi appris de leurs erreurs car supprimer des matchs c’est une perte économique vraiment énorme malgré qu’il ait des circonstances atténuantes étant donné que cela reste un sport d’été avec moins de concurrence. Du coup la saison dernière, une nouvelle convention collective a été signée dans la plus grande discretion.

Il faudra peut-être attendre encore quelques années pour que les 3 autres ligues majeures ne se mettent au même point…

A qui pourrait profiter le lockout ?

Evidemment le lockout n’est pas mauvais à 100% car il permet aux meilleurs joueurs de partir vers d’autres ligues (européennes notamment). Voir un Tony Parker à l’ASVEL ou un Nicolas Batum à Nancy fait toujours plaisir et permet de relever le niveau de la Pro A mais aussi la visibilité.

Voir une star NBA en Europe ou en Chine fait toujours rêver les supporters de  ces clubs.

Idem en NHL où un Rick Nash qui fait les beaux jours de Davos ou Ilya Kovalchuk en Russie apporteront la même chose.

Les joueurs auront toujours une porte de sortie, malgré tout il faut aussi voir l’effet pervers à cela, ces joueurs ne viendront que pour une courte durée et prendront la place de jeunes joueurs européens. Autre problème, si le lockout est court, le reste de la saison sera forcément faussée  avec le départ de ces joueurs car nécessairement le niveau baissera et le retour à l’anonymat fera mal pour certaines équipes…

Le principal perdant de ces lockouts : le public

Pourtant on peut se demander quel est le vrai perdant de ces lockouts ? La réponse semble claire, ce sont les spectateurs, fans et tout ce public qui font vivre le monde du divertissement sportif.  Pendant que les acteurs de ces sports se disputent pour des pourcentages, les fans eux subissent les effets de ces lockouts. Même s’il n’y a pas que le sport, c’est un des divertissements ou loisirs  préférés des français par exemple.

Imaginez demain que la Ligue 1 ou la saison de votre sport préféré soit annulée parce que les acteurs de ces sports veulent plus d’argent et que les ligues disent « on annule tout »? Ce serait carrément indécent… Heureusement que cette pratique est interdite en France et en Europe…

En écoutant quelques interventions, on a l’impression que de l’autre côté de l’Atlantique, les fans sont devenus déçus, blasés voire fatalistes, notamment en NHL, car ils n’y peuvent rien.

 Le lockout semble donc être un concept bien loin des désirs du public et surtout déconnecté de la réalité…

Article rédigé par Philodox.