Le football italien se meurt-il ?

debats sports image par defaut
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Alors qu’elle vient de concéder sa première défaite après une série d’invincibilité longue de 49 matchs, la Juventus Turin est en danger en Ligue des Champions. Placée dans un groupe particulièrement homogène avec Chelsea, le Chakhtior Donetsk et les surprenants danois de Norsdjälland, la Juve n’a remporté que 3 points lors des matchs allers. 3 points pour trois matchs nuls. Les turinois reçoivent ce soir les danois face auxquels ils n’ont pu faire mieux que match nul en périphérie de Copenhague. Tout autre résultat qu’une victoire pourrait bien condamner les champions d’Italie dans un groupe pour l’instant dominé par les Ukrainiens. Les hommes de Conte devront les semaines prochaines recevoir Chelsea dans leur Juventus Stadium puis jouer leur avenir européen en Ukraine.



L’avenir de l’autre club italien dans la compétition n’est pas non plus garanti. Bien qu’heureux au tirage avec comme adversaires, le FC Malaga contraint de se séparer de plusieurs de ses stars lors du dernier mercato, un Zenith Saint-Petersbourg vérolé par les tensions internes sur fond de jalousies salariales et les belges d’Anderlecht, le Milan AC n’a remporté que 5 points en 4 matchs. Et encore, hier soir, les milanais sont parvenu à arracher le point du match nul face à Malaga en fin de rencontre sur un but de Pato. Les espagnols étaient déjà assurés de leur qualification pour les huitièmes de finales. Second du groupe au bénéficie de la victoire des belges sur les russes, les hommes d’Allegri ont leur destin en main. Il leur faudra pour cela, s’imposer à domicile, ce qu’ils ne sont toujours pas parvenus à faire et espérer que les Sévillans déjà qualifiés jouent le jeu jusqu’au bout.

Au soir du 5 décembre prochain, on pourrait bien retrouver deux clubs italiens en huitièmes de finale de la Ligue des Champions, mais le simple fait que ces qualifications ne soient pas assurées car contestées par des clubs belges, russes et ukrainiens interpelle sur le niveau de la Série A.

Si les deux clubs italiens parvenaient en fin de compte à s’extraire des phases de poules, ils égaleraient la moins bonne performance italienne de ces dix dernières années avec seulement 2 clubs qualifiés à l’issue des phases de poules. Sur ces dix dernières années, les italiens se sont habitués à placer trois de leurs représentants dans la plus prestigieuse des compétitions européennes au delà des phases de poules. Cette édition 2012 marquera un pic faible dans l’histoire du football italien, au point de menacer son classement à l’indice UEFA ?

L’indice UEFA italien a toujours été solidement défendu par les performances des clubs italiens en Ligue des Champions. Avec seulement deux équipes engagées dans la compétition, la coupe aux grandes oreilles ne devrait pas être suffisante à l’Italie pour résister aux menaces françaises, portugaises et ukrainiennes. Il leur faudra alors se mobiliser en Europa League où les italiens disposent de quatre représentants : Udinese, la Lazio, Naples et l’Inter. Ces derniers pourraient bien faire figure de favoris de la compétition s’ils venaient à la prendre au sérieux. Dans le cas contraire, ils pourraient bien accélérer la prise de conscience de la nécessité d’un aggiornamento du football local. Parce qu’au-delà de l’indice UEFA, le football transalpin est confrontés à de sérieux défis.

Le football italien pourrait bien être à un tournant de son histoire contemporaine. L’intersaison du Calcio a été marqué par deux séries d’évènements qui sont amenés à sensiblement influer sur le cours du développement du football dans la botte :

  • le scandale du calcioscommesse et l’influence grandissante des paris truqués
  • la situation économique et politique du pays

Si les clubs italiens semblent bien se relever du premier (les sanctions relativement clémentes y contribuant sensiblement), la situation personnelle de Silvio Berlusconi condamné à 4 ans de prison pour fraude fiscale, et le poids des politiques d’austérité conduites par le gouvernement italien ne plaident pas en faveur d’un renouveau du football transalpin.

Les relations commerciales établies entre le PSG et le Milan AC caractérisent cet état de fait. Les clubs italiens perdent de leur compétitivité économique. Si le Milan AC s’est séparé de ses deux meilleurs joueurs face à des propositions financières qui ne se refusent pas, les clubs italiens se sont positionnés comme vendeur sur le marché davantage que comme destination d’accueil des nouvelles vedettes du ballon rond. Exceptée, la Juventus et dans une moindre mesure l’AS Rome et les clubs promus, les clubs de Serie A ont d’abord cherché à vendre avant de se positionner sur d’éventuels renforts. Ainsi, pour la première fois depuis la saison 2004-2005, la Serie A a plus vendu qu’elle n’a acheté.

 

La restructuration économique du football autour de la figure du grand stade et du merchandising connexe, n’invite pas plus à l’optimisme pour le football italien quand l’on connaît la vétusté des stades transalpins. A l’exception de la Juventus à qui, son passage en Série B semble avoir été salvateur, l’avenir des clubs italiens ne fera pas l’économie d’une profonde mutation.

Comme l’affirmait le puissant intellectuel italien, Antonio Gramsci, « la crise c’est quand le vieux se meurt et que le jeune hésite à naître ». Le vieux football italien est définitivement en crise. On ne connaît toujours pas les couleurs de son prochain étendard mais à moins d’une profonde refondation, il risque bien d’être bianconero.