Drummond, un pari gagnant

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Alors que les rookies 2013 connaissent des fortunes diverses pour leur première campagne dans la grande ligue, le géant de Motown fait figure de bonne surprise au sein de la cuvée. Son repos forcé en raisons de problèmes de dos nous donne l’occasion d’opérer un retour sur l’itinéraire d’un joueur appelé à dominer durant les saisons à venir



 

Big

Les fans de Tom Hanks auront saisi la référence, l’expression américaine « Manchild » désigne le jeune homme à la perfection depuis plusieurs années déjà.

Le néo-Piston est en effet, comme dans le film suscité tiraillé entre un corps d’adulte et un esprit qui ne l’est pas encore tout à fait.

Gardant profondément son âme d’enfant, le pivot a dû composer dès ses 15 ans avec une hype envahissante autour de ses moindres faits et gestes.

En tant que prototype physique hors-norme et poste 5 labellisé futur du pays à sa position, l’agitation a dans son cas été bien plus importante que chez les autres tops prospects, et on imagine aisément les souffrances du jeune Andre.

Drummond a trouvé une autre réponse que celle du héros de Goethe à ses problèmes.

Contrairement aux autres vedettes adolescentes, le futur Huskie a décidé de rester lui-même plutôt que de se lisser et de tenir des discours d’un professionnalisme exemplaire.

Manchild, le pivot l’est aussi dans son jeu puisque, derrière sa carcasse impressionnante, se cache un jeune basketteur devant faire l’apprentissage du jeu.

Ainsi, à l’été 2010, lors du championnat du monde de moins de 17 ans disputé avec l’équipe de Team USA, le néo-Piston n’a pas toujours l’occasion de briller. Dans une formation qui n’hésite pas à jouer petit, il n’obtient pas le temps de jeu qu’il aurait pu escompter et laisse la lumière à Michael Kidd-Gilchrist, et surtout à Bradley Beal, MVP du tournoi.

Revenu au pays de l’Oncle Sam, Drummond entame ce qui sera sa dernière année de lycée puisqu’il décide de se reclasser.

Pour ne pas perdre les néophytes, précisons que les basketteurs sont catégorisés en classe d’âge et que certains d’entre eux sont ‘coincés’ entre deux d’entre elles.
Dans certains cas (et avec des cours supplémentaires le cas échéant), les joueurs font donc le choix de rester dans leur classe d’âge ou de se reclasser dans l’année précédente, ce qui accélère leur arrivée à l’université.

En d’autres termes, le jeune Andre aurait pu rester une année supplémentaire au lycée…et donc ne pas être en NBA à l’heure actuelle.

Sur le plan sportif, cette décision était des plus judicieuses tant Drummond n’avait aucunement la capacité de progresser dans le milieu lycéen contre des adversaires auxquels il rendait trois têtes.

Un pari risqué

Pourtant doté d’une supériorité physique naturelle, Drummond n’en tire pas assez parti et s’avère moins tranchant qu’il ne le pourrait, comme en témoignent ses stats de Huskie (10 points, 7,6 rebonds mais 2,7 contres en 28 minutes)

L’équipe du Connecticut est éliminée au 1er tour du tournoi de la March Madness. Pendant le seul match de la compétition de sa formation, le pivot est littéralement transparent et n’a aucun impact sur le jeu.

Un malheur n’arrivant jamais seul, l’université est sanctionnée pour ses résultats académiques insuffisants et ne participera donc pas au tournoi NCAA de la saison prochaine.

Drummond se voit contraint de s’inscrire à la Draft qui se déroule fin juin de cette année 2012 puisque les transferts vers d’autres équipes universitaires causent également des durées d’inéligibilité pour le joueur.

Le processus pré-Draft peut commencer.

Deux opinions s’affrontent au sujet des pivots sélectionnés avec les hauts choix de Draft. Pendant longtemps, une large majorité des dirigeants sportifs constituait les tenants énergiques des maximes « If you have to make a mistake, make it big » ou encore « You can’t teach size ».

Mais des exemples très divers tels que Michael Olowokandi, Kwame Brown, Greg Oden ou Hasheem Thabeet ont fait jurisprudence et un scepticisme nouveau s’est instauré dans les consciences au fil des ans.

Dans ce cadre, l’arrivée du visage poupon de l’ancien Huskie sur le devant de la scène n’est pas propre à rassurer les professionnels de tout poil.

Lors des interviews, et notamment du Média Day, le géant fait véritablement peur, malgré l’envie manifeste de travailler que le joueur y affiche.

Au poids des mots s’oppose en fait le choc des photos d’un adulescent que beaucoup voit trop tendre.

Salué par tous comme un garçon adorable et drôle, les doutes n’en restent pas moindres quant à sa capacité à survivre sur le plan mental dans une ligue qui est un business, comme chacun aime à le rappeler.

Derrière la jovialité et l’entrain, les scouts voient ainsi un adolescent mal dégrossi et immature.

Annoncé jusqu’au 2ème choix, derrière l’indétrônable Anthony Davis, sa côte s’est en réalité beaucoup dégradée…

Des débuts prometteurs

Sélectionné seulement 8ème, le qualificatif de steal pour le prospect ne semble pas usurpé.

Pour rappel, un steal est un joueur qui tombe dans la Draft plus bas qu’il n’aurait du et qui fait donc nourrir quelques regrets à toutes les équipes qui ne l’ont pas choisi alors qu’elles en avaient la possibilité.

Si l’on commence à chercher en règle générale les steals vers la fin du 1er tour, l’atout considérable que représente un joueur dominant au poste 5 permet dans ce cas précis d’utiliser ce terme.

Et pour cause, le nouveau venu à Detroit a aligné les performances irréprochables. Auteur de statistiques correctes (7,3 points à 59,2%, 7,5 rebonds et 1,7 contres en 19,7 minutes) en sortie de banc, il s’est tout particulièrement distingué le 29 Janvier dernier en devenant le plus jeune basketteur à compiler 18 points et 18 rebonds en sortie de banc.

Une performance qu’il est le seul depuis 25 ans, avec Dwight Howard, à avoir réalisé avant de souffler ses vingt bougies.

Si le mérite lui en revient avant tout, il ne faut pas pour autant occulter le rôle de mentor de Greg Monroe dont il est le parfait complément dans la raquette.

Plus encore, le cas Drummond est intelligemment géré par le trop souvent décrié coach Lawrence Franck, qui fait débuter pédagogiquement son rookie sur le banc pour ses premiers pas sur les parquets NBA.

Après une période d’indisponibilité que son entraineur surveille de très près pour qu’elle ne soit pas vécue comme négative par le joueur, le Piston pourra reprendre le jeu et se développer pour devenir l’un des meilleurs de la ligue à son poste, son éthique de travail n’ayant été jusqu’ici pas pris à défaut.

Gardons tout de même à l’esprit qu’aucun basketteur n’est malheureusement à l’abri des coups du sort.

Sauf blessure donc, le pivot Andre sera sans nul doute à même de dominer les raquettes outre-Atlantique pour le reste de la saison, et celles à venir sans pour autant perdre son âme d’enfant.