De quoi le nouveau maillot du PSG est-il le nom?

debats sports image par defaut
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Lors de la 37ème journée de Ligue 1, le Paris Saint-Germain avait prévu des festivités grandioses destinées à effacer l’image des incidents du Trocadero. L’évènement était d’autant plus majestueux que l’icône du football britannique, David Beckham prenait sa retraite et faisait ses adieux à un jeu dont il a été un des principaux ambassadeurs devant un Parc des Princes qui fêtait le troisième titre de champion de son histoire.



Si certains joueurs se sont teints les cheveux ou le crane pour marquer l’évènement, si Becks a versé des larmes qui trustent les écrans du monde entier, l’équipementier du PSG et son service merchandising ont quant à eux profité de l’occasion pour présenter la nouvelle tunique du club pour la saison prochaine.

Le moins que l’on puisse dire c’est que le produit laisse sceptique. Si chacun se fera son opinion sur l’aspect esthétique du maillot, sa composition n’est pas anodine. Pour sa troisième saison à la tête du PSG, la nouvelle direction du club a tourné le dos au mythique maillot Hechter.

De l’effacement de Saint-Germain à la prépondérance du blanc.

Depuis leur prise de contrôle du club, les nouveaux actionnaires du PSG ont manifesté leur intention de valoriser l’identité parisienne du PSG au détriment du volet saint-germinois. Cet effacement progressif est parfaitement illustré par le nouveau logo du club, et franchement assumé. Lors de la présentation de ce dernier, Nasser El-Khelaifi avait explicité ses intentions.

L’évolution du logotype du Paris Saint-Germain marque une étape importante dans la mise en œuvre de notre ambition : faire du Paris Saint-Germain une des plus grandes marques mondiales de sport.

LogoPSG

Si ce nouveau logo conserve la mention Saint-Germain, elle n’est plus l’égal de la mention « Paris » et est reléguée au bas du logo en lieu et place de la date de création du club. De la même manière, le berceau emblême de la ville de Saint-Germain en Laye qui rappelle que le roi soleil est né en 1638 dans la commune a disparu et laisse la fleur de lys seule sous  une Tour Eiffel rabaissée.

Epurée à sa plus simple expression sur le nouveau logo, la référence saint-germinoise est au contraire démesurée sur la dernière mouture du maillot du PSG. C’est du moins ce que la première impression laisse envisager.

Il en va différemment si l’on se réfère au dossier de presse du club,

« le nouveau maillot domicile bleu marine, met à l’honneur les couleurs traditionnelles du club (sic) avec un nouveau design. Il affiche un graphisme plus moderne (re-sic) constitué de blocs de couleurs à l’avant du maillot, une vraie évolution par rapport au design historique qui faisait appel aux bandes verticales« .

L’abandon du mythique modèle Hechter est donc présenté comme une manifestation de la modernité du nouveau design en opposition au conservatisme du classique bleu-blanc-rouge-blanc-bleu, véritable marqueur identitaire du club francilien. Toutefois, le service communication du club insiste sur la préservation des couleurs historiques. Si le bleu du logo a été quelque peu retravaillé, les couleurs traditionnelles du maillot sont préservées avec le dernier avatar de la marque à la virgule. Le bleu et le rouge de Paris côtoient le banc de Saint-Germain en Laye. Si de prime abord, il est possible d’appréhender la prépondérance du blanc comme le contrepoids de la disparition du berceau sur le logo, la suite du dossier de presse du club donne une autre interprétation de ce que sont les « couleurs traditionnelles ».

Cette combinaison de couleurs dominantes reflète la suprématie que le PARIS Saint‐Germain s’efforce d’obtenir sur le terrain, tout en représentant chacune une valeur différente du club : la grandeur (le bleu), la passion (le rouge) et le respect (le blanc). Le maillot est pourvu d’un col ras du cou côtelé bleu et d’ourlets côtelés rouges au niveau des manches.

L’introduction d’un large bloc blanc ne correspond donc pas à la volonté de conserver une référence implicite à Saint-Germain en Laye via le symbole de la royauté, pas plus que le bleu et le rouge ne représentent la ville de Paris. Le bleu, le blanc et le rouge distribués au hasard correspondent donc à des « valeurs » érigées en références du club : la grandeur, la passion et le respect. A ce niveau d’abstraction, tout peut représenter n’importe quoi et inversement. Rien n’interdit alors de considérer que les valeurs références d’un club en pleine mutation puissent évoluer au fil des succès ou que les couleurs associées permutent. Le marron pourrait représenter la réussite et le violet la victoire. Le nouveau maillot du PSG ne représentant surtout in fine plus grand chose.

Si l’abandon du maillot Hetcher n’est pas une innovation de la nouvelle direction du PSG, le contexte interroge. Peu à peu, la référence à Saint-Germain disparaît des outils de communication du club. Elle est réduite à portion congrue sur le logo du club et les couleurs du maillot ne lui font plus référence.

Plus fondamentalement se pose la question de ce qui constitue l’identité des clubs de football. Le maillot, les couleurs en sont les expressions les plus manifestes. Rompre avec l’histoire et les référents visuels majeurs du club est d’autant plus incompréhensible que le PSG fait partie de ces rares clubs à disposer d’un maillot identitaire reconnaissable entre mille, et que la marque des grands clubs est précisément de ne pas le galvauder. Pour la fantasie, les exigences du service marketing ou les bénéfices des équipementiers, le maillot third a été inventé.

Ce nouveau maillot est un véritable test de l’attachement des supporters parisiens à l’histoire de leur club et à ses couleurs.    Un élément d’arbitrage entre la « modernité » de la nouvelle direction et de son service merchandising et le « conservatisme » des supporters et des défenseurs de l’histoire du Paris-Saint Germain. Les anciens abonnés privés de leur sésame pour le Parc des Princes n’achètent plus de produits dérivés du club et ne compteront pas parmi ceux qui pré-commanderons le nouveau maillot, les actuels abonnés bouderont certainement une tunique qu’ils ont pour une part non négligeable d’entre eux conspué lors de sa présentation. C’est du moins ce que l’on attend d’eux.

Dans un club où une part substantielle des supporters a été renouvelée, où le centre d’entraînement est amené à déménager, où les joueurs et l’encadrement sont de passage, seul le Parc des Princes et le maillot Hechter font le lien entre le passé, le présent et l’avenir. S’ils abandonnent ou galvaudent le second sans contestation de la part de leurs supporters, quel sort réserveront-ils au premier?